En sus de la remarquable réputation qu'il avait, avec l'aide symbiotique de son compère Tenhaeff, réussi à acquérir en Europe, (lire à ce sujet le dossier sur ses cas les plus "béton"), l'incomparable détective psychique Gérard Croiset avait réussi, en mai 1976, à se faire un méga-coup de pub, qu'il avait exploité par la suite jusqu'à plus soif. Tout commença, pour le public du moins, par cette émission de télévision à fort taux d'audience au cours de laquelle un miracle se produisit... Laissons cet article d'époque du Japan Times nous replonger dans l'ambiance :
Un tel exploit, extraordinaire, déclencha un véritable traumatisme chez nombre de personnes. Les croyants à la "parapsychologie" de part le monde s'envolèrent au septième ciel, et de nos jours encore, continuent à asséner ce cas "indiscutable" à leurs adversaires sceptiques pris de court, qui ne peuvent répliquer, vu la distance tant spatiale, que temporelle, que linguistique, qui les sépare des faits... Fort heureusement, il n'y a pas au Japon que des chaînes de télévision en mal d'audience, il y a aussi des sceptiques qui aiment bien vérifier ce qu'on leur raconte. Il se trouve que dans le cas de Miwa Kikuchi, ils sont les mieux placés pour enquêter. Le résultat de leur enquête fait l'objet du chapitre 10 du livre Shin tondemo chôjôgenshô 56 no shinsô ("tondemo files 56") [56 faits extraordinaires expliqués], par Minakami Ryûtarô, Shimizu Kazuo, et Kamon Shôichi (Ohta shuppan, 2001), que nous allons parcourir pour éclairer la lanterne de ceux de nos lecteurs qui ne savent malheureusement pas lire le japonais. Comme vous allez le lire, les sceptiques de l'empire du Soleil Levant ont une façon très polie de commencer, mais savent achever leur sujet... dans tous les sens du terme !
La légendeCommençons par récapituler les faits tels qu'ils sont connus du grand public. Même au Japon, Croiset a fait montre sans l'ombre d'un doute de ses facultés extraordinaires de clairvoyance. En mai 1976, Il était venu au Japon pour apparaître dans l'émission Spécial mercredi à l'invitation de NET (actuellement Telebi Asahi). A cette occasion, il avait fait une clairvoyance sur la localisation du cadavre de la petite Miwa Kikuchi (7 ans), ville de Chihara, Chiba, qui avait disparu à la même époque. Les membres de l'équipe de télévision furent les premiers à retrouver le cadavre de la fille noyée, dans un lac de barrage, selon les indications de Croiset, et cet évênement extraordinaire justifia une émission spéciale dans tout le Japon qui jeta un grand trouble. Arrivé au Japon le 3 mai, Croiset s'enferma directement dans son hôtel, et le lendemain vers 15 heures, ayant dit qu'il voulait "travailler un peu", il fit son apparition sur la chaîne NET. Ensuite, pressé par les directeurs de la chaîne, il commença sa clairvoyance concernant la petite Miwa disparue. Croiset frotta un moment dans sa main la photographie de Miwa que l'équipe de télévision lui avait passée, et rapidement annonça : Je me fais peut-être des idées, mais cette fille est déjà morte.Ensuite, sur un bloc-notes se trouvant à proximité, il dessina sans hésitation une carte des environs de la maison de la fillette, où pourtant il n'avait jamais pu mettre les pieds. Il décrivit la scène par la suite de la façon suivante :
L'équipe de télévision, étonnée par la clairvoyance de Croiset, fonça sur les lieux, et constata sur place que tout correspondait à sa description. A proximité de la maison de la fille passait bien la route nationale 297. Il y avait aussi un lac de retenue construit pour l'eau industrielle derrière le barrage Yamakura, dans ce lac flottaient des bâteaux, et dans le lac se trouvaient une tour métallique de couleur jaune. Pour couronner le tout on pouvait même trouver une casse de voiture, ainsi qu'un parc d'amusements pour enfants. Alors que le cameraman de l'équipe s'avançait vers le lac, filmant la scène en tous points conforme à la description "vue" par Croiset, une voix s'éleva parmi les autres membres de l'équipe, qui allaient dans la même direction : "Attention ! Cameraman ! Vite ! J'aperçois quelque chose de rouge là-bas !" Au fur et à mesure que le cameraman avançait sur le rivage, la forme de l'enfant noyée, portant sa veste rouge, flottant à la surface de l'eau et dont on n'apercevait guère que la pointe des cheveux se précisa. Cette découverte stupéfiante fut diffusée dans l'émission "Mercredi spécial" du 5 mai. L'émission ayant réalisé un taux d'audience de 30,5%, le bureau de l'émission fut assailli aussitôt par plus de 3000 coups de téléphone. On ne se doutait pas que l'équipe de télévision, aidée par la clairvoyance de Croiset, découvrirait le cadavre de la fille avant la police. Ceci étant, l'équipe de télévision fit-elle équipe avec la police et, jusqu'à la diffusion de l'émission, garda-t-elle la découverte secrète ? Il n'est pas exagéré de dire que ce seul évênement constitua une preuve cinglante des superpouvoirs de Croiset.
La réalité des faitsDe nos jours encore, bien que 25 ans se soient écoulés depuis la diffusion télévisuelle des images de ce cadavre de petite fille surnageant à la surface d'un lac, le traumatisme reste vivace dans l'esprit de nombreuses personnes. Croiset a-t-il vraiment trouvé la petite fille grâce à ses superpouvoirs ? Retournons 25 ans en arrière dans le temps, et cherchons à établir la vérité sur ce qui s'est passé. En fait, Croiset est venu deux fois au Japon en 1976. Une fois en mai, et la seconde fois en décembre, les deux fois pour passer dans l'émission Mercedi spécial. Il est piquant de souligner que lors de cette deuxième émission, Il n'a absolument rien réussi à "voir". Du simple fait qu'absolument rien de sensationnel n'avait eu lieu à l'émission de décembre, au contraire de celle de mai, presque tout le monde a oublié la simple existence de cette deuxième émission. Toutefois, quand on se pose la question de savoir comment on fabrique les émissions montrant des superpouvoirs, il est plus intéressant de regarder la seconde émission de plus près. Pour cela, considérons principalement pour commencer un article de l'époque, à propos de l'émission de décembre, paru dans le magazine Shûkan shinchô. Cette émission avait été diffusée le 15 décembre 1976. Il était prévu, pour cette fois, que Croiset fasse une clairvoyance concernant deux enfants disparus : l'un, un garçon de 6 ans nommé Shigekazu Komehara, disparu lors d'une partie de cache-cache avec des amis dans la ville de Yukuhashi (Fukuoka) en janvier de l'année précédente, et l'autre, une fille de 6 ans, Naoka, disparue subitement en août 1976 dans un grand magasin de Nemuro (Hokkaidô). La technique CroisetLe 12 décembre, Croiset, arrivant à Fukuhashi, il fut introduit dans un studio aménagé par l'équipe de télévision dans la maison de Shigekazu, pour une entrevue avec les parents. Là, ouvrant une carte des environs, en plus de vérifier où se trouvait le terrain de jeu dans lequel Shigekazu avait fait sa partie de cache-cache, il demanda, en faisant traduire sa question : "A 50 mètres environ, se trouve-t-il un restaurant ?". Le père répondit par l'affirmative, et Croiset demanda coup sur coup "Derrière, y-a-t'il une maison avec un toit bleu ?", "Et à côté, une piscine ?", "Et un jardin public ?", "N'y-a-t'il pas aussi une mare ?", "Et un transformateur ?", questions auxquelles le père répondit "oui". Puis il sortit. Puis l'équipe de télévision accompagna Croiset au dehors, à environ 500 mètres de là, où Croiset prétendait que se trouvait un point "d'où émanait une forte énergie". La conversation en resta là. Croiset alla déjeûner avec l'équipe. En fait, ayant cherché en vain un point possible d'enlèvement, il avait pris un endroit au hasard et c'était tout. N'ayant absolument rien de neuf à dire, le sujet s'arrêta brusquement en cours d'émission. Si ce n'était que ça, on pourrait se dire que Croiset loupe une vision de temps en temps, mais l'article du Shûkan shinchô met en lumière le fait qu'avant de commencer sa "voyance", Croiset s'était fait communiquer une énorme quantité de données concernant Shigekazu. En effet, le père de Shigekazu avait déjà voulu rencontrer Croiset lors de sa précédente venue au Japon, en mai, mais n'avait pas pu. Il lui avait donc expédié par la poste, en Hollande, des photos, des cartes de Kyûshû, et autres documents à profusion. Ensuite, le personnel de NET était allé rendre une visite au domicile du père de Shigekazu en septembre, visite au cours de laquelle ils prirent des vues de l'habitation et de ses environs. On pense que ces photographies avaient aussi été envoyées à Croiset. Mieux encore, Croiset avait fini par avoir en sa possession jusqu'à la carte des environs de la maison de Shigekazu, une de ces cartes si détaillées qu'elle montraient jusqu'aux allées les plus fines et donnait le nom de chaque bâtiment, et sur laquelle la disposition du terrain de jeu dans lequel Shigekazu jouait à cache-cache était indiquée au moyen d'une croix. Mais alors, si Croiset avait déjà tout cela en sa possession, quel besoin avait-il eu d'aller jusque chez le père de Shigekazu et de poser toutes ces questions qui tournaient autour du pot ? Avec une carte aussi détaillée en sa possession, avait-il besoin de demander encore où se trouvait la piscine, le jardin public, ou même la mare ? C'était en fait un bon moyen pour lui d'éviter les soupçons et de faire comme si il ne connaissait pas déjà le coin. Pour votre information, l'autre cas, celui de la voyance concernant la disparition subite dans un grand magasin de Nemuro, une énorme campagne de recherche impliquant jusqu'aux chiens policiers, avait été déclenchée, mais sans le moindre résultat positif. Pourtant, Croiset avait montré une étonnante connaissance des environs, allant jusqu'à indiquer un magasin de tôfu, une boucherie, une côte, des toits rouges, le tout ayant une allure plausible. Mais il y avait quelque chose d'extrêmement curieux. Comment se faisait-il que le hollandais Croiset avait connaissance de choses purement japonaises, comme le magasin de tôfu ? On ne peut s'empêcher de conjecturer que Croiset avait été informé à l'avance. En tout cas, il ne fait aucun doute que Croiset préparait ses "voyances" à l'avance concernant les lieux sur lesquels il était censé "travailler". Et même de cette façon, il n'avait rien pu trouver lors de ses prestations de décembre. Pourquoi ?Et là est le problème. Que se serait-il passé si Croiset avait pu retrouver la piste de Shigekazu lors de l'émission spéciale de décembre ? Aurait-on pu aussi simplement découvrir que NET s'était arrangé pour arroser Croiset d'informations avant son entrée en scène ? Aurait-on pu s'informer du fait que, par exemple, l'équipe de télévision avait pris en photo la maison et ses environs pour tout envoyer à Croiset, ou du fait que Croiset disposait d'une carte détaillée des lieux ? Quelle chaîne de télévision commettrait l'acte suicidaire de porter ombrage à une émission qui réalise sans problème de forts taux d'audience ? Au moment du succès de la clairvoyance de Croiset lors de l'émission de mai, la chaîne avait juré, la main sur le coeur, qu'aucune information n'avait été communiquée à l'avance à Croiset. Mais alors, dans ce cas, après le succès phénoménal de la première émission, en mai, le bureau de l'émission était-il si peu rassuré qu'il lui paraisse nécessaire d'effectuer tout ce travail d'information souterraine préparatoire pour l'émission suivante ? On ne peut alors s'empêcher de suspecter qu'il y a donc dû aussi y avoir quelque chose de ce genre avant l'émission de mai, pour le cas de Miwa. Mais ce n'est pas tout.Il y a aussi de nombreux points très suspects concernant l'émission de mai. Sur la carte qu'il avait dessiné pour le cas de Miwa, Croiset avait nommé la large route qu'il avait dessinée "route nationale". Et en effet, la route nationale 297 passe dans le voisinage de l'habitation de Miwa. Le problème est, comment Croiset pouvait-il savoir qu'il s'agissait d'une route nationale ? Sur ce point précis, le journaliste du Shûkan shinchô avait bien vérifié auprès de l'interprête de Croiset, Yan De Frees, qui avait confirmé : "Il a bien dit "Je vois une route nationale", et non une simple route. "Route nationale" est l'expression qu'il a utilisée.". Quand on regarde d'un oeil critique les voyances effectuées par Croiset jusque là, on s'aperçoit qu'il employait toujours des expressions suggérant qu'il avait été ou était "physiquement" dans le lieu oû il était censé faire ses recherches ; "Quelque chose surgit hors de l'eau", ou "Il y a un toit jaune", suggèrent le sens de la vision, par exemple. Mais si il "voyait" une grande route, comment peut-il savoir qu'il s'agissait d'une route nationale ? Même si l'on suppose qu'il pouvait "distinguer" les panneaux situés sur les bords des routes, comment Croiset, qui ne savait pas déchiffrer le japonais, aurait-il pu faire la différence entre une route nationale et une route régionale, qui sont des routes également larges ? N'est-il pas approprié de penser que dans le cas de la disparition de Miwa, l'information selon laquelle cette grande route passant à proximité de la maison de la fille est gérée par le pays (route nationale) provient d'un travail préparatoire effectué par quelqu'un d'autre ? Si l'on admet que Croiset a eu connaissance d'une carte des environs de l'habitation de Miwa avant sa prestation de mai, l'effet de sa voyance concernant l'incident de Miwa est quasiment réduit à néant. Le barrage Yamakura, où le cadavre de Miwa a été repêché, ne se situe qu'à 800 mètres de son habitation. Même en ne jetant qu'un bref coup d'oeil à la carte des environs de la maison, Croiset n'avait aucune raison de pas remarquer la présence du lac de barrage. En ne gardant à l'esprit que la route nationale et le lac de barrage, tracer de tête une carte des environs de la maison de Miwa ne pose aucune difficulté. Dans le cas de Shigekazu, de Yukuhashi (Fukuoka) aussi, comme s'il était sorti il avait mentionné un jardin public, par exemple, mais il y en a partout. Dans le cas du lac de barrage, il eut été fort étrange que ne s'y trouvât pas un quai avec des bâteaux flottant. Même s'il faisait mine de ne pas trop trouver, même s'il trouvait parfaitement, si on lui avait déjà fourni toute information à l'avance, il avait d'autant moins de raison de s'égarer. Infos à gogoSelon le magazine Young Lady, le moment où Croiset s'intéressa au cas de Miwa se situe dans la journée du 4 mai, lorsque lors de l'émission Afternoon show il fut question du cas de Miwa ; il y vit alors une opportunité. Lors de ce Afternoon show, des vues de la maison de Miwa et des environs, ainsi que des séquences tournées sur place ont dû être diffusées. Il est aussi hautement problable que des plans simplifiés des lieux aient été montrés. Si cela était, il n'y aurait rien de mystérieux au fait que Croiset ait su par avance que se trouvaient une étendue d'eau ainsi qu'une route nationale à proximité de la maison de Miwa. Juste avant de faire sa voyance, il est donc très probable que Croiset ait eu, par télévision interposée, pas moins que le résumé des évênements, ainsi qu'un plan simplifié de la scène du drame. Concernant la description des environs de la maison de Miwa, la description de Croiset ne comporte qu'un seul élément pouvant être qualifié d'unique : la casse de voitures. Une casse de voitures, au contraire d'un jardin public ou même d'un magasin, ne se trouve pas partout. Mais Croiset n'avait pas donné cet élément de lui-même. Le personnel du studio de télévision, sans prendre garde, avait donné des informations à Croiset. Selon Yan De Frees, qui servait d'interprête à Croiset, la clairvoyance de Croiset concernant Miwa commença subitement dès 17 heures le 4 mai, dans le bureau du directeur de NET. A ce moment, Croiset, à propos des environs du lieu de la disparition, ne parla pas d'une "montagne de carcasse de voitures", mais, poursuivant ce qu'il avait commencé à dire au sujet de la route nationale, "dans un lieu proche de la route nationale, je peux voir des voitures". C'est alors qu'un membre de l'équipe de télévision, qui était prélablement allé en reconnaissance sur place, fit la remarque suivante : "A propos, il y a une casse de voitures dans les environs", et s'interrompit brusquement. Dans "un lieu proche de la route nationale", il semble plutôt naturel de supposer que l'"on peut voir des voitures", mais grâce à l'imprudence de cet employé, Croiset glissa rapidement vers une "casse de voitures" plus gratifiante. Ceci dit, si l'on se demande pourquoi cette "casse de voitures" était devenue une vision, le fait est que c'est parce que la version filmée originale de la clairvoyance de Croiset n'en parlait pas. Croiset ayant surpris tout le monde par la soudaineté avec laquelle il avait commencé à faire sa clairvoyance, on fit revenir dans le bureau le personnel qui l'avait quitté et durant les deux heures qui suivirent on fit refaire, devant les caméras, toute la comédie, depuis le premier témoignage inclus... et c'est cela qui fut diffusé par la suite. En quelque sorte, la voyance de Croiset telle qu'elle avait été diffusé lors de cette émission n'était qu'une sorte de remake. Et c'est ainsi que, dans cette seconde version infidèle à l'originale, le "lieu où l'on peut voir des voitures" devint "la casse de voitures". Lors d'une expérience sur un "psychique", il est de première importance de ne pas transmettre au sujet testé d'information. Malgré cela, par imprudence, Croiset a bénéficié d'informations qu'il ne devait pas recevoir, ce qui a biaisé le résultat de sa clairvoyance, et de ce fait l'assertion de NET selon laquelle rien n'avait été transmis à Croiset est dénuée de fondement. Au moment où Croiset, ayant "envie de travailler un peu", était apparu au studio, l'équipe de l'émission spéciale était déjà partie en repérage dans les environs de la maison de Miwa. En bref, loin d'être un évênement, la clairvoyance de Croiset concernant Miwa avait été planifiée depuis le début par le studio. Et tout ceci sans parler de la seconde émission spéciale, celle de décembre, où lorsque l'on pense au fait que Croiset avait bénéficié, avec un soin particulier, de jusqu'à une carte sur laquelle une position était marquée d'une croix, on ne peut éliminer le doute quant à savoir si par hasard, même sans intention de le faire, pour ce qui est de l'émission du 5 mai aussi, un arrangement prévu à l'avance n'aurait pas filtré du côté de Croiset... Oui, mais...Il y a aussi la remarque selon laquelle, même si Croiset a pu savoir à l'avance l'allure du terrain, il ne pouvait pas en être de même concernant sa clairvoyance concernant le lieu où l'on trouverait le cadavre de Miwa. Oui, mais il se trouve que ceux qui prenaient part aux recherches venaient justement d'arriver à la conclusion, après tous leurs efforts, que le cadavre de Miwa ne pouvait se trouver que vers le barrage de Yamakura. Dans ce cas, pourquoi ne pas avoir cherché dans ce barrage ? Parce que les parents de Miwa avaient explicitement exclu cette possibilité, ils avaient déclaré : "Miwa ne va pas s'amuser là-bas", et le barrage avait été relégué en dernière position dans l'ordre des recherches. Ce n'est qu'après l'échec de toutes les autres recherches que tout le monde pensa simultanément à aller examiner le barrage. Les journalistes de NET, ayant suivi l'affaire depuis le début, devaient bien savoir ça eux aussi. En fait, le jour-même de la découverte du cadavre, dès 9h30 du matin, une formation de 300 personnes, comprenant des policiers de la brigade d'intervention mais aussi 160 gens du voisinage, avaient préparé une battue dans le barrage de Yamakura. En gros, même sans la "voyance" de Croiset, le cadavre aurait été retrouvé en trois bonnes heures, selon la police. Mais le choc de la douloureuse vision du cadavre de Miwa sur l'écran de la télévision a fait oublier autre chose. Il s'agit d'un gros point que Croiset a exprimé lors de sa vision. A propos du cadavre de Miwa, il avait déclaré : "Elle s'est noyée dans le barrage et ne remontera pas avant une semaine." Qu'un cadavre flotte ou ne flotte pas, on peut a priori ne pas penser que c'est important, mais sur ce point le magazine Shûkan shinchô présente un membre d'une association de jeunes locale qui disait d'un ton dégoûté : "S'il dit qu'elle s'est noyée dans le barrage, comme même si pour le moment on ne peut pas dire qu'elle ne s'y est pas noyée, et s'il dit qu'il faudra environ une semaine pour la retrouver, vu qu'il a l'intention de quitter le Japon dans l'intervalle, tout devrait bien se passer.". En effet : S'il disait que Miwa s'était noyée dans le barrage, Croiset ne courait aucun risque. En gros, si un enfant se perd et qu'on ne le retrouve pas malgré des recherches intensives, on pensera plutôt qu'il a eu un accident, est tombé quelque part et est caché par un buisson, ou alors qu'il est tombé dans l'eau et s'est noyé. Croiset, venu de la Hollande, pays de digues et de moulins à vent, avait souvent dit à propos des enfants perdus qu'ils s'étaient noyés dans un canal. Au Japon aussi, il n'est pas difficile, si l'on sait que pas loin de la maison d'un enfant disparu se trouve un barrage, de dire qu'il s'est noyé dans son lac de retenue. Mais au fait...Autre chose : lors de cette fameuse émission du 5 mai qui, à ce que l'on dit, fut une grande victoire pour Croiset, on oublie que celui-ci eut à résoudre deux autres cas. En plus de Miwa, il y avait le cas d'un enfant de 1 an et demi, perdu après que son père, qui l'avait emmené avec lui pour une sortie en famille, se soit suicidé en passant sous un train. A propos de celui-ci, il annonça que son corps était enterré sur la rive de la rivière Tsurumi, et pendant toute l'émission on fouilla à la pelle l'endroit désigné, ce qui se termina sans le moindre succès. Croiset avait fait deux affirmations complémentaires, à ce propos : "Il aura été emporté par une pluie forte" et "Son cadavre est enterré le long des berges de la rivière Tsurumi". On comprend aisément que, que l'on retrouve ou non le cadavre du bébé, cela ne changerait rien au fait que Croiset pourrait se prévaloir d'un succès. Il aurait aussi bien pu ne rien dire en l'occurence. Il y eut aussi le cas d'une femme dont on avait perdu la trace après qu'elle soit partie d'une autre émission (où l'on rencontre des gens) en direction de l'Hôtel Impérial. Tout en faisant sa clairvoyance en décrivant un endroit près du temple de Kichijôji, près d'un immeuble de 8 étages avec trois poutres, sans qu'on sache trop pourquoi il annonça "Ce sera tout, il y a des gens gênants ici." et mit fin à sa séance de clairvoyance. De fait, on ne peut pas dire que les deux autres voyances de ce jour-là aient été des succès. Enfin, le magazine Shûkan shinchô jette un doute à propos du fait que Croiset avait changé d'interprête en cours de route. L'interprête qui s'occupait de Croiset durant l'émission, Yan De Frees, avait pris ses fonctions le jour suivant son arrivée au Japon, le 4, à 17 heures. On avait demandé à une indonésienne mariée à un japonais mais, si jamais cette femme avait parlé à Croiset de quelque chose concernant l'incident de Miwa, l'énigme du don de voyance de Croiset n'aurait plus été une énigme. Il faut confirmer que l'équipe de NET a pu découvrir le cadavre de Miwa avant la police, mais dire que ce serait dû au superpouvoir de Croiset, comme on l'a exposé ici, est extrêmement douteux. |