Cercle Zetetique

Un nouveau coup mediatique du SEPRA :
« L'OVNI vu par un pilote-instructeur »

 ( 9 décembre 2002 aérodrome de Mark « Calais-Dunkerque » )

Dossier réalisé par Erick Maillot.

Vous pouvez réagir à ce dossier dans son forum en ligne associé.


Le 12 août 2003, au cours de l'émission de France 2 « On vous dit pourquoi » présentée par Jérôme Bonaldi et consacrée à la planète Mars, fut diffusé un reportage qui prétendait que des scientifiques étudiaient les ovnis.

Au lieu d'informer le public sur la difficulté d'interprétation des images des sondes spatiales (à titre d'exemple, le faux visage martien ou les photos de pseudo-« végétation » martienne médiatisées encore récemment), l'équipe journalistique de Jérôme Bonaldi a, chose peu habituelle, plongé dans la facilité du sensationnalisme. Sans rapport avec la Planète rouge et la conquête spatiale, ce reportage sur les ovnis (vus sur Terre et non sur Mars jusqu'à plus ample informé) tombait comme un cheveu sur la soupe. A moins que le commanditaire de ce reportage, ne considère que le public en est encore au stade de croire que les ovnis sont des engins pilotés par des Martiens ou bien que « On vous dit pourquoi ? » devait implicitement inculquer au public cette idée, désormais désuète. Encore un exemple d'occasion manquée par un journaliste d'instruire le grand public en expliquant comment et pourquoi certaines personnes confondent parfois des planètes comme Mars, Vénus ou Jupiter, notre satellite la Lune, voire même des étoiles, avec des ovnis et de démythifier les prétendus ovnis vu par des astronautes ou filmés d'une navette. La matière éducative ne manquait pas pour notre chaîne de service public.

Evidemment, le seul scientifique « ès ovnis » présenté fut Jean-Jacques Vélasco, responsable au sein du CNES de Toulouse du mini Service d'Expertise des Phénomènes Rares Aérospatiaux, organisme qui n'est que la continuité relookée du Service d'Expertise des Phénomènes de Rentrées Atmosphériques, ayant préféré changer de nom après son énorme bévue dans sa communication sur l'ovni du 5 novembre 1990 (Lire les travaux lucides de Robert Alessandri sur cette affaire : )

Venons-en aux faits présentés pendant l'émission. Le 9 décembre 2002, vers 10h45, Eric Ganachaud, pilote instructeur (depuis 30 ans), décolle dans un TB20 avec deux élèves à bord. Le vent est faible et la visibilité est parfaite. A 500 pieds, lors de la montée, cet instructeur dit alors avoir observé un phare « comme celui d'un avion Mirage mais 4 à 5 fois plus gros que la taille d'un phare habituel ». Il précise qu'il a l'habitude d'observer des Mirages dans ce secteur mais que cela n'y ressemblait pas. Il a l'impression que l'ovni lumineux fonce vers lui. La tour de contrôle ne signale aucun avion dans son secteur.

Le pilote entame alors un virage à droite. Dès lors l'ovni s'éteint pour se transformer en une boule grise qui s'éloigne plus vite qu'un Mirage vers Dunkerque.

Le commentateur indique que d'après le directeur du SEPRA, qui a recoupé, vérifié et « n'a rien laissé au hasard », « l'ovni n'a laissé aucun écho sur les radars » et même que « l'ovni n'est pas dû à un phénomène météo rare ni à un engin secret. »

Faisons un petit intermède pour réfléchir quelques minutes sur ce nouvel « ovni made in SEPRA », sur la base des informations contenues dans ce reportage.

  1. D'après le plan montré dans le reportage, la piste de l'aérodrome de Mark « Calais-Dunkerque » a un axe 243°N - 63°N.
  2. J.J. Vélasco montre un secteur Est-Nord-Est sur une carte qui est celle du lieu (bord de mer visible). Le pilote voit l'ovni partir vers Dunkerque. Ceci permet de dire qu'il décollait dans l'azimut 63°N.
  3. L'ovni cesse d'être lumineux quand l'avion quitte ce cap. Nous avons là typiquement un phénomène résultant d'une méprise par reflet avec le soleil. J-Jacques Vélasco, diplômé d'un Brevet d'Optique et ingénieur au CNES, devrait pourtant savoir qu'observer le reflet d'une source lumineuse quasi ponctuelle (le soleil) n'est possible que dans un secteur angulaire très limité et que ce secteur dépend de la position de l'observateur (de l'angle témoin-> angle surface miroir->source lumineuse). Il faut que l'angle de réflexion soit égal à l'angle d'incidence sur la surface réfléchissante. Dans le cas présent, dès que le pilote vire, il n'est plus dans l'axe de réflexion et l'objet « miroir » s'éteint pour devenir gris, puis disparaître en s'éloignant donc en diminuant de taille angulaire jusqu'à ne plus être perceptible par l'œil nu.

    Le pilote a probablement été aussi victime d'une illusion psychologique causée par l'éclat lumineux et la crainte d'une collision (idée du phare avant d'un Mirage) qui lui font penser que l'ovni vient droit vers lui, alors qu'il le verra d'abord fixe puis en train de s'éloigner une fois « éteint ».

    Ce type d'effet de « perle lumineuse » sur un avion de ligne au loin est spectaculaire mais connu (et peut se prévoir selon la trajectoire d'un avion). Personnellement, il m'est arrivé de nombreuses fois de montrer à mes enfants cet effet saisissant sur des avions de ligne très lointains alors que le soleil était bas. Joël Mesnard, un ufologue « orthodoxe », publia même un article dans sa revue Lumières Dans La Nuit pour expliquer que des planeurs provoquent ce type de reflets trompeurs dans un beau ciel pur.

  4. Dans le reportage, le pilote ne décrit pas explicitement la disparition de l'objet. On peut présumer qu'il l'a perdu de vue sur son arrière gauche en virage.
  5. Suivant l'habitude des journalistes et du SEPRA, un seul témoin est interviewé. Erreur importante et surtout opportune, courante dans cette ufologie amateur que n'hésite pas à critiquer, ailleurs, J.-J. Vélasco. Il commet cependant les mêmes erreurs lors de ses interventions dans les médias. On dénombrait pourtant deux autres témoins, qui avaient probablement eux aussi des choses à dire… Ah, c'est vrai ! Ils ne sont qu'élèves pilotes donc pas encore infaillibles. Leur témoignage ne serait alors que de peu d'intérêt pour le SEPRA qui a pourtant adopté une stratégie médiatique de promotion de l'ovni axée sur les pilotes ? Trois témoins, le SEPRA en ignore deux et en garde un. Un brin étonnant.
  6. Les radars n'ont pas enregistré de traces de l'ovni en question. Logique et J.- J. Vélasco ne saurait l'ignorer. Si c'en était un, le contrôle civil ne pouvait l'enregistrer dans son mode de fonctionnement normal (radar secondaire avec transpondeur). Parions aussi que les militaires n'ont pas non plus enregistré d'écho non-identifié, sinon le directeur du SEPRA se serait fait un plaisir de nous le faire savoir (comme avec la fausse corrélation « radar-visuel » du Cdt Duboc en 1994, voir à ce sujet Le dossier "VSD 2001".
  7. L'expert du CNES aurait affirmé que ce n'est pas un phénomène météo ni un engin secret (comme si l'armée dévoilait ses engins secrets au SEPRA !). Pour une fois nous sommes sensiblement d'accord avec ses constats. Mais il ne mentionne pas avoir vérifié le plus élémentaire, une méprise des plus courantes : un reflet solaire sur un aéronef conventionnel (ils ne manquent pas dans ce secteur).

Le SEPRA :

  • Dispose-t-il la liste des vols civils internationaux et nationaux (y compris privés) ayant survolé la région à l'heure dite ? On demande à la voir !
  • connaît-il la position des avions de chasse français, Mirage ou autres, qui pouvaient être en vol près de Dunkerque. Un terrain d'exercice militaire (Lefrinckouke, Zuydcoote) se situant juste à l'ouest de cette ville , justement dans la direction d'observation.
  • a-t-il contacté les autorités militaires belges ? Leurs avions et hélicoptères, F16 et Seaking par exemple, qui n'hésitent pas à pénétrer souvent assez profondément le territoire frontalier. On notera toujours dans la direction d'observation la base de Koksidje, proche de Dunkerque. Il y a aussi Chièvres et Florennes comme bases frontalières.
  • Un planeur en vol dans la direction indiquée peut donner cet effet de phare. Toutefois cette hypothèse est moins probable (mais non exclue !) pour trois raisons : le pilote en a probablement déjà vu (au sol c'est quasi certain mais en vol ?); ces reflets sont extrêmement brefs souvent du fait du vol en spirale du planeur. Ils se reproduisent généralement plusieurs fois pour un observateur qui est fixe au sol (mais ici ce n'est pas le cas de notre pilote). Il suffit que le planeur vire et parte en ligne droite , très loin, pour que cela soit envisageable.
  • A-t-il formellement exclu la présence d'un hélicoptère médical, de la gendarmerie ou de la sécurité civile ?

Enfin l'hypothèse d'un exercice de tir, en mer, d'un petit missile mer-air mériterait aussi d'être formellement exclue. On connaît quelques cas de confusion avec ces engins.

Croire que le pilote a vu un objet volant qu'il n'a pas pu identifier est une évidence. En revanche, croire que cet objet était non terrestre, inexplicable ou mystérieux et qu'il serait dès lors un cas d'ovni solide, bien vérifié, exige pour un esprit rationnel de demander au SEPRA-CNES (comme aux journalistes de « On vous dit pourquoi »), par décence et respect pour le public, de prouver que toutes les vérifications sus-citées ont aussi été faites pour exclure au moins une méprise due à un reflet solaire.

Revenons à présent au cours du reportage sur les activités du SEPRA (nous reviendrons ensuite sur le cas de Calais).

J.-J. Vélasco précise que 20% des 6500 cas signalés (depuis la création du GEPAN) sont de vrais ovnis et qu'il n'est pas exclu qu'ils viennent d'ailleurs que de notre planète … A l'occasion d'une soirée martienne très médiatique, autant pousser le bouchon sur le pourcentage des « vrais » cas d'ovnis, qu'il situe parfois plus modestement à 5%.

Le commentateur précise que le SEPRA étudie entre 120 et 150 cas par an. Impressionnant n'est-ce pas ? (6500 cas depuis 1977 donnent pourtant 250 cas par an !). De quoi penser que l'Hexagone est envahi par les ovnis. En moyenne cela donne plus d'un ovni tous les 2 jours (0,68/j pour 6500 cas en 27 ans) ou un tous les 3 jours (0,48 cas/j pour 150 par an) qui serait signalé aux gendarmes puis au SEPRA pour « étude » ou « expertise ».

Cela donnerait aussi, toujours en moyenne, près de 30 « vrais » ovnis chaque année sur lesquels le SEPRA, dépendant d'un organisme scientifique public, ne fournit aucune nouvelle, aucune information au public. De ce fait, certains ufologues complotistes en viennent à penser qu'ON (lire : l'armée, le SEPRA, le gouvernement, les services secrets, et même votre voisin…) nous cache des preuves de l'existence des soucoupes volantes et des extraterrestres. En résumé, les propos et l'attitude du SEPRA/CNES invitent à la paranoïa, alors qu'ils devraient être des modèles de transparence, de pédagogie scientifique visant à instruire et rassurer le public.

150 (à 250 !) ovnis par an : que d'enquêtes, que de travail abattu par un seul homme qui trouve néanmoins également le temps de faire des conférences, de se rendre aux quatre coins du monde pour promouvoir la recherche scientifique sur les ovnis, de donner des interviews aux médias,… Probablement travaille-t-il même durant ses périodes de congés pour faire face à cet emploi du temps, théoriquement surchargé. Bon, il est vrai qu'il existe des années creuses où les ovnis délaissent notre territoire. Mais cela implique alors des années chargées, avec plusieurs centaines de témoignages à analyser et expertiser. S'informer, vérifier ou recouper les informations, évaluer et mettre en forme le dossier, chercher une explication possible, formuler ses conclusions, le classer pour archivage nécessite de 3 jours à 1 mois (voire une année) selon les cas, d'après mon expérience en ce domaine. Serait-ce un enfer que de travailler pour ce service - que le commentateur qualifie de « très spécial » - du CNES ?

Nous aimerions juste connaître la teneur exacte des dossiers sur les cas de 2002 ou 2003 et surtout constater la qualité des expertises du SEPRA correspondantes … Mais comme le SEPRA se réfugie, astucieusement, derrière l'anonymat des témoins (pourtant souvent connus publiquement !) et l'interdiction de diffusion du contenu des PV de gendarmerie durant 60 ans (pour les mêmes raisons de respect de la vie privée et de l'anonymat) pour ne pas communiquer d'information (surtout à ceux qui veulent les vérifier avec un esprit critique) vous êtes, comme nous, forcés de croire le SEPRA… sur paroles et non sur preuves ou dossiers scientifiques.

Mais alors si l'accès aux informations sur les ovnis est ainsi « verrouillée », pourquoi voit-on le directeur de ce même SEPRA préciser, à plusieurs reprises, à des heures de grande audience télévisée ou dans des revues à grand tirage, le nom de témoins, relater en détail leurs observations de « vrais ovnis solides » ? Des machines volantes aussi insolites, des engins aussi fantastiques devraient intéresser les autorités militaires et être logiquement classés ultra-top-confidentiels si l'on en croit les ufologues « conspirationnistes », les anciens généraux du COMETA, Jean-Jacques Vélasco du SEPRA et surtout… les lois en vigueur. A moins que tous ces dossiers « solides » ne contiennent que des méprises, du vent en fin de compte… Quelqu'un ayant intérêt à conserver un poste budgétaire souvent remis en question au sein du CNES aurait-il intérêt à brasser régulièrement ces courants d'air d'ovnis ?

Cette hypothèse semble trouver un début de confirmation dans la suite de l'émission. Le reportage se poursuit en effet avec l'observation du Cdt Duboc du 28 janvier 1994 sur lequel il existe désormais de nouvelles informations issues d'un rapport interne au SEPRA. Un rapport bien caché  mais non réellement « confidentiel » puisque la seule page du rapport (portant bien cette mention en haut de page) voit son contenu, relatif à la trace radar, livré pour publication à Paris Match en 1997. Et devinez par qui ? Par Monsieur Vélasco lui-même. La confidentialité des données ne constitue donc pas son vrai souci.

Le VSD « spécial ovni » de novembre 2003 m'incite à garder pour plus tard les nouvelles sur l'affaire Duboc pour revenir sur quelques précisions apportées par l'article intitulé : « Un procès verbal de gendarmerie exceptionnel, UN OVNI AU DESSUS D'UNE CENTRALE NUCLEAIRE ! » . Hé oui, messieurs, mesdames, approchez ! Venez voir cet ovni, « quasiment à la verticale de la plus puissante centrale nucléaire de l'hexagone ». On sent le professionnel de l'accroche qu'est le rédacteur Bernard Thouanel. Sentez-vous la menace que représente l'ovni au dessus de Gravelines ? (Une émission d'un rayon hypothétique désintégrateur cosmique et c'était  la catastrophe nucléaire ! On a eu chaud.) Bon, personne n'a rien vu d'insolite à la centrale de Gravelines mais certains journalistes, peu rigoureux, s'en moquent bien. Il faut le vendre comme un événement remarquable ce piètre récit de lumière diurne lointaine dont même Jean-Jacques Vélasco déclare dans ce VSD : « ce cas en lui même n'est pas exceptionnel ». C'est clair, en substance, voici le seul cas aéronautique non-identifié que le SEPRA peut donner en pâture au public (depuis celui de 1994). Ce serait un des plus fameux parmi les 30 « vrais ovnis » (déjà sélectionnés parmi les 150 ou 250) annuels. Edifiant.

Tout aussi édifiante est la publication dans VSD d'un PV de gendarmerie, pièce officielle normalement publiable uniquement après un délai de 60 ans, comme le SEPRA l'a rappelé dans une circulaire aux gendarmeries. Dans un simple procès en justice, le saviez-vous, il vous faudrait prendre un avocat pour avoir le droit de voir et disposer de … votre propre P.V. De quoi se demander si Bernard Thouanel bénéficierait de droits différents des autres citoyens, sans que cela ne dérange le SEPRA détenteur des ces documents ? Positivons : même s'il est réduit en taille, le P.V demeure lisible et permet d'obtenir quelques précisions fiables et utiles.

Voyons quelles sont les infos nouvelles données par VSD (il y en a, c'est déjà ça) :

  1. La durée :
    • Au bout de 3 à 4s, je ne voyais plus rien dit le pilote instructeur. Il arrivait de face … ca semblait ne pas bouger.
    • Après extinction, il voit une boule gris terne de 3mm de diamètre angulaire qui s'éloigne en 5 à 6 secondes . En prenant une loupe, on aperçoit sur le PV que le pilote dit « 4à 5 sec » aux gendarmes.
    La durée totale d'observation de l'ovni de l'année 2002, estampillé « SEPRA » : 7 à 10 secondes.

  2. La distance estimée :

    Bernard Thouanel écrit que l'ovni est « situé à 7 à 8 km a peu près, au dessus de la centrale de Gravelines toute proche ». Or Gravelines est à 15 km de l'aérodrome d'après la carte IGN 1/100.000… Le P.V nous apprend que le pilote instructeur a déclaré aux gendarmes que l'ovni se situait à environ 5 km et qu'il estimait la visibilité claire jusqu'à 7 km.

    Notons que le pilote instructeur dit « ne plus voir le sol mais le ciel bleu ». C'est donc sa connaissance des lieux et caps qui lui permet de dire que l'ovni était vers Gravelines (15km) puis est parti vers Dunkerque (25km). Il observe des avions de ligne au dessus de lui allant vers Bruxelles (couloir aérien au 134° ou 99° probablement). Il ne fait par conséquent aucun doute que les conditions météorologiques étaient très bonnes. L'objet pouvait se situer effectivement bien au delà des 5km. Dix kilomètres, vingt ? Mystère. Sur un fond de ciel bleu sans arrière plan et sans savoir la taille réelle de l'objet, on en est réduit aux supputations.

  3. La taille estimée :

    Elle est de 3 mm, soit 0,3 cm pour 80 cm à bout de bras (verrière) cela fait 0,3 m pour 80 m, soit environ un objet de 30 m à 8 km. Nous sommes dans une fourchette de dimensions cohérentes avec des appareils volants humains. Un simple reflet sur un avion de ligne vu au loin, à plus de 10km environ, ferait l'affaire, tout autant qu'un hélicoptère se dirigeant vers Dunkerque (en direction d'un hopital ou de l'aérodrome de Ghyvelde) sachant que l'estimation angulaire d'une « boule de lumière » est trompeuse. Une tendance à la surestimation de la taille du fait de l'intensité lumineuse est probable. Difficile de le vérifier puisque l'on ne dispose pas d'estimations en comparaison de la part des témoins (Vénus, étoile connue).

  4. Les autres témoins délaissés :

    Après le SEPRA, ils n'ont toujours pas la parole avec VSD. Alors l'instructeur les fait parler, avec honnêteté visiblement. Il est clair, au grand dam de l'instructeur, qu'ils n'ont vu que la boule de lumière et n'attestent pas la vision de la boule grise. On aurait vraiment aimé les lire s'exprimer eux-mêmes. Ils ont peut-être une explication… simple. Dans ce contexte on appréciera ce passage de la main de Bernard Thouanel  : «  Jean-Jacques Vélasco … car s'il prend l'affaire au sérieux c'est bien parce que les _trois témoins sont d'une fiabilité indiscutable_ ». Cela ne s'invente pas ! D'autant qu'une loupe permet de voir que nos 2 autres témoins ont bel et bien été entendu par la gendarmerie qui en a dressé procès verbal (cf copie PV page 09) et pris leurs croquis des faits.

  5. La recherche d'échos radar :

    Comme je le pressentais, toujours rien de non-identifié en vue sur les radars militaires (cf VSD p11). Parfaitement logique s'il s'agit d'un reflet sur un aéronef civil ou militaire. On notera que un an et quatre mois après l'attentat du 11 septembre 2001, il serait étonnant que l'on puisse survoler la centrale nucléaire de Gravelines à 300 m d'altitude (comme l'estime le pilote instructeur) d'altitude sans être rapidement repéré et éventuellement poursuivi par la défense aérienne militaire. L'instructeur etle SEPRA doivent savoir que cette zone nucléaire est normalement interdite de survol sous les 1000 pieds/300 m. De quoi s'étonner que cet ovni n'ait pas inquiété le CODA. Le rapport COMETA alertant notre défense sur ces vilains ovnis n'aurait-il servi à rien ?

  6. L'explication par un reflet :

    Ouf, le pilote instructeur y a pensé. Mais alors pourquoi le SEPRA n'en a pas parlé à la télévision ? !  Voyons les arguments du témoin. Ce ne pouvait être un reflet :

    • car « au mois de décembre le soleil est encore bas à cette heure de la matinée ».

      Première erreur. Justement aurais-je envie de dire à ce pilote, c'est bien quand le soleil est bas que l'on voit souvent des reflets solaires sur les avions de ligne (des ufologues exercés peuvent en attester). En journée le reflet est plus souvent vers le haut, non visible du sol. Ici l'avion des témoins n'est pas au sol mais il en est bien proche (200 m maxi)

    • « De plus le soleil était perpendiculaire à la trajectoire de l'avion ». C'est exact (63°+90° = 153°N, le soleil était au 152°N). Mais il y a une erreur de raisonnement : c'est l'angle de la surface réfléchissante qui compte. Or ici ce peut être le fuselage d'un avion de ligne, d'un hélicoptère ou les ailes d'un avion de chasse. Il suffit que celui-ci soit entrain de terminer un virage au loin (avant de partir en ligne droite vers Dunkerque) pour que durant approximativement 4 secondes il y ait un reflet sur le fuselage ou les ailes. L'ovni-avion n'étant pas repérable au premier coup d'œil en cours de virage, avant le reflet, du fait qu'il était non lumineux et lointain.

      Et lointain, il devait l'être pour que la tour de contrôle ne signale aucun trafic proche du TB20 Trinidad. Là encore, le croquis d'Eric Ganachaud est instructif. Il y dessine un avion (s'éloignant de lui ou venant vers lui ?) quasiment à la même hauteur angulaire que l'ovni. On ne nous dit rien de cet avion … Le contrôle sol ne lui a pas signalé cet avion alors pourquoi s'étonner qu'il ne signale pas l'objet situé dans le même secteur angulaire… L'avion dessiné est-il un de ces avions de ligne (qu'il identifie grâce à leur traînée) dont parle Eric Ganachaud ? Il y avait donc dans le ciel, à ce moment là, d'autres pilotes, témoins potentiels. Ont-ils été recherchés et contactés par le SEPRA ? Encore un mystère…

      Dans le P.V et sur son croquis, l'instructeur situe, de mémoire, le soleil au 130°N. En fait il était au 152°N à 9h45 TU (10h45 légales). Constatons que la marge d'erreur d'estimation d'azimut, faite de mémoire par un pilote chevronné, exercé aux caps et azimuts, pour un objet connu, est de +ou- 22°. Avis aux ufologues et au SEPRA ! A ce propos, toujours dans le P.V, l'instructeur indique qu'il monte au cap 70° alors que la piste 06 est au 63°N exactement ou 60° approximativement. Peu de chance pour que le faible vent venant d'est explique cette dérive de 7° vers l'est et sur 200 m d'altitude.

      (NDA : Le reportage TV indiquait probablement par erreur « 11h45 » soit 10h45 TU, soit un soleil au 166°N.)

Enfin signalons une autre erreur d'estimation du pilote instructeur. Ce n'est pas parce qu'un objet X (ici considérons un avion de ligne ou de chasse) se situe à une faible hauteur angulaire dans le ciel qu'il se situerait « à 300m de hauteur/ 1000pieds sol ». Il y a là une incohérence énorme sur l'altitude par rapport à la distance : si l'objet est bien à 5km (au moins) et aussi à 300 m du sol, il eut été angulairement trop bas (à 3,3° !) donc invisible du pilote instructeur dans le cockpit de ce Trinidad au décollage « en cabré à 10° » ! L'ovni était donc plus dans les 15-20° de hauteur angulaire (vu sa position sur la verrière du cockpit dans le dessin p.11) soit entre 1300m et 1800m d'altitude pour seulement 5 km de distance. Pour 10 km, les altitudes doublent.

Le pilote instructeur chevronné se trompe donc au minimum de 4 fois à 6 fois sur l'altitude estimée si la distance estimée est bien de 5 km. CQFD !

Et le responsable du SEPRA, qui n'a pour sa part manifestement décelé aucune incohérence dans ce témoignage, veut nous faire croire que ses enquêtes sont sérieuses et scientifiques. Les faits montrent pourtant qu'ici elles n'intègrent même pas de simples notions de calculs trigonométriques.

Alors infaillibles ou fiables ces témoignages des pilotes ? Ni plus ni moins qu'un agriculteur qui a souvent les deux pieds bien sur terre et plus de repères visuels que le simple bleu du ciel. Le chef de service du SEPRA - CNES déclare pourtant : « Avec un pilote on a quand même l'avantage , par rapport à Monsieur Tout-le-Monde, d'être en présence d'un témoin, qui de par sa profession, est en mesure d'évaluer un certain nombre de facteur comme la vitesse, l'altitude, le déplacement, etc… ». Nous avons vu de qu'il en est sur l'altitude et l'azimut. Mais admettons…

Cela dispense-t-il le SEPRA d'investigations, recoupements et vérifications digne d'un service scientifique ? L'expert du SEPRA nous donne la réponse alors qu'il critiquait, chose amusante, les enquêtes et méthodes des zététiciens :

"Un bon scientifique c'est un scientifique qui doute mais qui doit mettre en œuvre tous les moyens, _tous les moyens _, pour essayer de comprendre les phénomènes auxquels il a affaire" (J.J Vélasco Café des Sciences de Chambéry , mai 2002).

Comme bien d'autres dossiers antérieurs, ce cas d'observation d'ovni et l'enquête du SEPRA qui lui est associée sont révélateurs d'une approche, pour le moins révolutionnaire, que Jean-Jacques Vélasco compterait présenter dans son bilan au conseil scientifique du CNES, voire à l'Académie des Sciences si l'on lit entre les lignes, avant de prendre une retraite bien méritée. Elle se résumerait ainsi :

Peu importe la qualité des données relatives aux objets volants non identifiés ; s'ils émanent en quantité de pilotes, c'est que les ovnis existent et qu'en conséquence la science doit s'y intéresser.

Il y a quelque chose de quasi fascinant à imaginer le SEPRA revendiquant devant cette « prestigieuse assemblée », la scientificité de ses études sur le phénomène ovni grâce à l'usage d'une méthode qui a consisté à ne voir ni les erreurs d'enquêtes ni les erreurs de témoignages. Cette nouvelle vision de l'approche en « en double aveugle » , que le SEPRA a scientifiquement éprouvée au fil des années, lui a permis d'obtenir des résultats très significatifs de l'existence d'un phénomène inconnu qui se manifeste à l'évidence dans 3% à 37% des cas (variation qui dépend de l'auditoire).

On peut lire en page 15 du VSD que sur 157 dossiers renseignés comme ovnis aéronautiques (incluant ceux depuis 1951, que ni le GEPAN, ni le SEPRA n'ont enquêté), le pourcentage d'ovnis « vrais » est de 14,6% (avec un doute sur 19% vu que la couleur n'est pas visible !). Ce qui donne, au moins, 22 cas d'ovnis aéronautiques, sérieux et passionnants, depuis 1951 ? Quels sont-ils ? Sont-ils aussi solides que les deux « vrais ovnis aéronautiques» les plus médiatisés par le SEPRA : celui du Cdt Duboc (1994) et celui du pilote instructeur Ganachaud (2003) ? Deux cas qui ne résistent pas à un simple examen critique.

L'avantage avec les statistiques, c'est que l'on peut leur faire dire ce que l'on veut et qu'elles évitent un regard trop curieux sur les vraies données des dossiers, cas par cas, erreur par erreur.

19/11/2003, E.Maillot.

Note : proposition a été faite par Email au responsable du SEPRA « d'en corriger les éventuelles inexactitudes avant publication » par un ajout en fin de ce texte. Aucune réponse depuis le 12/11/03. La proposition tient toujours…